Ses interventions en milieu scolaire sont rares, mais précieuses. Ecrivaine et théologienne protestante, Marion Muller-Colard est spécialisée dans les questions d’éthique - elle a été appelée par Macron en 2017 au comité consultatif national d’éthique -, mais elle écrit aussi pour la jeunesse. C’est par le biais de son éditeur « Les petits Platons », chez qui elle a publié Le professeur Freud parle aux poissons , qu’elle a été retenue par le cabinet du ministère de l’Éducation nationale pour participer au dispositif « Vacances apprenantes », cet été. Installée à Linthal dans le Haut-Rhin, c’est finalement au collège Victor-Hugo à Colmar qu’elle est venue animer deux ateliers philosophiques d’une heure, pour le plus grand plaisir du principal Eric Loesch.
« Moi ce qui me plaît, c’est de voir les jeunes penser, explique-t-elle. Il y a quelque temps, je suis intervenue régulièrement dans une classe, et au moment du bilan, une petite fille de CP m’a dit : « Avant je pensais, mais maintenant je pense que je pense » ! C’était génial. »
« En philosophie c’est presque pas possible de se tromper, c’est pas comme en maths »
Vendredi après-midi, c’est à sept jeunes de 6e et 5e qu’elle pose la question : c’est quoi la philosophie ? Les débuts sont balbutiants. Quelques réponses timides, à peine audibles. « Je vous entends hyper mal, c’est dur avec les masques. » Mais Marion Muller-Colard poursuit, et au fil du temps l’échange devient plus fluide. « Tout ce que vous avez dit, c’est faux, mais c’est juste. En philosophie, c’est presque impossible de se tromper, c’est pas comme en maths. Tout ce que vous allez dire va être intéressant. » Une jeune fille, visiblement intriguée, jette un regard en coin à sa voisine, d’un air entendu.
La discussion se poursuit autour du rêve. Plus particulièrement un rêve où on écrabouille sa sœur avec un marteau et qu’on se réveille super bien, alors qu’avant de s’endormir on réfléchissait au cadeau qui lui ferait plaisir pour son anniversaire… « Qui croit que les rêves c’est le hasard ? » Les mains se lèvent, toutes les réponses sont décortiquées avec bienveillance. « Quand on réfléchit bien, ils ont toujours un sens, même s’il est caché », lâche une élève. « Des fois y’ a des rêves prémonitoires », continue un autre. « C’est un peu magique ce que vous me racontez là ! », pointe l’intervenante.
Marion Muller-Colard leur parle de son fils, très bon élève jusqu’en 3e , qui tout à coup ne veut plus travailler. « J’étais fâchée, et il m’a dit que c’était sa vie. En fait, en réfléchissant, je me suis rendu compte que c’était moi que ça blessait d’avoir un fils qui travaillait pas à l’école, qui voulait pas faire de grandes études. Ça ne me valorisait pas MOI, c’est une blessure narcissique. Vous savez ce que ça veut dire ? » Un collégien compare Narcisse au Schtroumpf coquet. « Vous voyez, on n’est pas toujours celui qu’on croit être, il faut toujours rester ouvert à soi. Sinon, je continue à me disputer avec mon fils, et on va s’éloigner. » L’auditoire en reste pantois. La démonstration fait écho à sa définition de la philosophie : « Apprendre à se contredire soi-même ». « Vous connaissez Freud ? » Nous y voilà !
La sonnerie retentit. C’est déjà terminé. « Quoi ? Mais madame, je croyais que ça durait deux heures !!! »
August 30, 2020 at 11:03AM
https://ift.tt/3b9pchB
VACANCES APPRENANTES. « Apprendre à se contredire soi-même » au collège Victor-Hugo - DNA - Dernières Nouvelles d'Alsace
https://ift.tt/2NvsBMN
éducation
Bagikan Berita Ini
0 Response to "VACANCES APPRENANTES. « Apprendre à se contredire soi-même » au collège Victor-Hugo - DNA - Dernières Nouvelles d'Alsace"
Post a Comment